WANG-FÔ

La beauté des anciennes légendes chinoises

Qu’on trouve normalement chez des grands écrivains… Je pense tout de suite au Comment Wang-Fô fut sauvé de Marguerite Yourcenar. Ce vieux peintre qui réussissait produire des œuvres plus vraies que le vrai, tout en vivant come un mendiant – lui et son disciple – finit par être arrêté par l’empereur :
« - Tu me demandes ce que tu m’as fait, vieux Wang-Fô ? (…)  Tu m’as menti, Wang-Fô, vieil imposteur : le royaume de Han n’est pas le lus beau des royaumes et je ne suis pas l’Empereur. Le seul empire sur lequel il vaille la peine de régner est celui où tu pénètres, vieux Wang, par le chemin des Milles Courbes et des Dix Mille Couleurs. Toi seul règnes en paix sur des plaines couvertes d’une neige qui ne peut fondre et sur des champs de fleurs qui ne peuvent pas mourir. Et c’est pourquoi, Wang-Fô, j’ai cherché quel supplice te serait réservé, à toi dont les peintures m’ont dégouté de ce que je possède, et donné envie de ce que je ne posséderais pas. Et, pour t‘enfermer dans le seul cachot dont tu ne puisses sortir, j’ai décidé qu’on te brulerait les yeux, puisque tes yeux sont les deux portes magiques qui t’ouvrent ton royaume. Et puisque tes mains sont les deux routes aux dix embranchements qui mènent au cœur de ton empire, j’ai décidé qu’on te couperait les mains. »

L’apprenti veut sauver le vieux. Il attaque l’empereur. On lui coupe la tête. L’empereur demande Wang-Fô  de finir une des peintures qu’il possède. Et c’est là que commencent les miracles... En peignant l’eau (lac, mer, océan peu importe) tout se noie :

« Les tresses des courtisans submergés ondulaient à la surface comme des serpents, et la tête de l’Empereur flottait comme un lotus. (…)-       … Je ne me doutais pas qu’il y avait assez d’eau dans la mer pour noyer un empereur. Que faire ?
-       Ne crains rien, Maître, murmura le disciple [réapparu portant étrange écharpe rouge au cou]. Bientôt, ils se retrouveront à sec et ils ne se souviendront même pas que leur manche ait jamais été mouillée. Seul l’Empereur gardera au cœur un  peu d’amertume marine. Ces gens-là ne sont pas faits pour se perdre à l’intérieur d’une peinture. »
« Le sillage s’effaça de la surface déserte, et le peintre Wang-Fô et son disciple Ling disparurent à jamais sur cette mer de jade bleu que Wang-Fô venait d’inventer. »


Fin.
No comment.
C’est un conte si beau ! Il a été offert à mes enfants mais il est toujours dans ma bibliothèque. Que dire ? La peinture sauve et tu peux aussi te perdre dedans…

YOURCENAR, M., Comment Wang-Fô fut sauvé
Première parution en 1979
Illustrations de Georges Lemoine
Collection Folio Cadet (n° 178), Gallimard Jeunesse 






source: http://www.seroux.be/spip.php?article37

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